mardi 18 décembre 2007

Nouvelle étape - attente...

Retour au réel, en occurrence, la longue route qui mène au Québec !

Une nouvelle fournée de papiers a été rassemblée, tamponnée et envoyée, avec moult renseignements concernant les moments forts de ma brève existence.

Attente...

En parallèle une démarche de fond pour préparer au mieux le grand
saut :
    - créer un site Internet très professionnel (et pas du tout anonyme celui-là...) pour préparer au mieux mon arrivée en douceur sur le marché du travail de la Belle Province, avec en passant quelques questions d'importance [autant privilégier l'humain - le bilan d'une vie se jauge aux moments d'amitiés et d'étreintes ; et je n'ai plus le coeur à passer 12 heures par jour devant un ordi à tracer des lignes de code]

    - penser à régler une foule de démarches désagréables (assurance, banque, appart, job and Co, impôts, billets d'avion...)

    - réaliser que le Canada n'est plus pour moi un fantasme brumeux mais un vrai pays avec un champ des possibles infini, mais aussi des possibilités infinies de se casser la gueule...

    - quoi me séparer des amis et de la famille !? Et de trouver une solution : les faire immigrer tous ! Mais de réaliser que tous n'étaient pas prêts à tout quitter et à larguer les amarres pour une vie d'aventure (et d'incertitudes, ah...)


Si loin, si proche...

Attente...

jeudi 13 décembre 2007

Helen Levitt à la Fondation Cartier-Bresson

Par une curiosité que je ne m'explique pas, régulièrement, comme je quitte le Canal Saint-Martin et sa fureur de vivre pour faire mes révérences amicales à la Fondation Cartier-Bresson, je suis obligé de braver la tempête !... Si bien que je n'ai vu cette superbe fondation du fond de l'Impasse Lebouis que dans le clair-obscur de la nuit tombée, sous des ciels gris-bleus d'orage, les nuages défilants au-dessus de nos têtes balayées par des vents rageurs !

Aujourd'hui encore, luttant contre les courants contraires je me fis allié du mauvais temps, et arrivai transi, trempé et heureux, pour me jeter avec délice dans l'oeuvre de Helen Levitt exposée ici, que je connaissais si mal, mais dont quelques photos, piochées ici et là, m'accompagnaient partout...

L'exposition, présentée sur trois étages, est passionnante !

Helen Levitt s'est tellement remise en question [a tellement remis son art en question], et fait évoluer sa pratique de la photo [techniques, cadrages, couleurs, perspectives] qu'on a l'impression de découvrir sur deux niveaux les oeuvres de photographes différents.

Au premier, des photos en noir et blancs prises dans les quartiers pauvres de New-York. Des scènes de rues pour la plupart. Prises sur le vif.
Il n'y a pas d'effet recherché, les cadrages sont propres, posés, équilibrés.
Il y a une grâce qui transparait de toutes ces photos, une candeur comme si l'époque était alors plus douce que la notre, une naïveté aussi - [dans les regards doux et un peu lointains, les graffitis dessinés à la craie sur les murs ou à même la route, les jeux d'enfants, l'idée d'une pauvreté qui ne serait pas violente, d'une égalité candide des blancs et des noirs] - et souvent de l'humour et du détachement.

Au deuxième étage, les mêmes rues, mais la donne a changé ! Comme deux faces d'une même réalité ; l'une négative, l'autre positive ! (Ce qui finalement est assez logique dans une expo photo...)

Les photos ici sont de couleurs vives [de grandes portes décrépites aux aplats de rouges écaillés de blancs, des verts olive parcheminés de jaunes, des touches de verts éclatants, des bleus profonds], et laissent affleurer partout une violence contenue [les cadrages se font dynamiques, les images se télescopent, les corps sont en mouvement, forts et musculeux , le travail est physique, harassant [de pousser des chariots à roulettes, de porter des sacs géants], les corps sont dédoublés, pris dans des jeux de miroir, la ville est fiévreuse, la vie fragmentée et éclatée]. Des volutes de tags enveloppées de couleurs ont remplacé les graffitis en bâtonnets tout raides des enfants.

La troisième salle s'ouvre sur un loft ouvert et lumineux qui domine Paris.

Et moi, tanné dans un canapé devant un film drôle et trépidant, de me dire que décidemment j'adore cette photographe. Que j'adore cette Fondation. Et de me promettre d'y retourner vite, un jour prochain de tempête !...

Mais encore !
Fondation Cartier-Bresson : www.henricartierbresson.org
Crédits photo : Helen Levitt

samedi 8 décembre 2007

Bouquin en cours - Les âmes grises

Les âmes grises, de Philippe Claudel.

Il se dégage pour moi de ce livre une impression de bleu teinté de gris.

La couleur de la ligne horizon des Vosges. La couleur du froid et de la glace. De la fumée et de la patine métallisée des armes.

Je l'avais lu il y a longtemps déjà, et m'y replonge avec délice, en ces temps d'hiver et de pluie - lové bien au chaud dans une lumière orangée, sautillante de feu à l'âtre ; nourri en perfusion de petits cakes aux fruits confits et de thé parfumé.

Et me régale de cette petite musique, de ces mots superbes et cristallins, choisis à propos et à usage unique, enchâssés dans un cocon de phrases ciselées aux équilibres parfaits.



Mais encore !

La première phrase :
Je ne sais pas trop par où commencer.

La dernière phrase :
Je peux maintenant te rejoindre.

Extrait :
Quelquefois, lorsqu'elle le rencontrait dans la rue, elle lui caressait le front comme on le fait pour ceux qui ont la fièvre, et lui se pâmait alors de connaître la tiédeur de sa paume.
Plusieurs auraient aimé être à la place de l'innocent. Maire était en quelque sorte leur part de rêve. La jeune femme le berçait comme un enfant et lui avait des attentions de jeune fiancé. Aucun ne pensa jamais à s'en moquer.


Les âmes grises, Philippe Claudel.
Code EAN / ISBN : 9782234056039
Nombre de pages : 288
Date de parution : août 2003
© Editions Stock, 2003

>> http://www.editions-stock.fr

mercredi 5 décembre 2007

Internet and Co


Joomla! est un compagnon fidèle. Je le couve et le flatte d'un oeil amoureux, lui me répond dans son langage fleuri [clonck], et notre hymen ainsi se prolonge et résiste aux vents les plus sournois...

Joomla! est un système de gestion de contenu ! Du vrai, du solide, du garanti sur facture, de la race de champion ! La preuve en est : il a remporté en 2006 et 2007 le prix du meilleur CMS Open Source, par KO, toutes catégories confondues !

Inutile de dire que moi [son père adoptif, son amant, sa maîtresse, sa confidente, son amoureux et sa chérie, tout à fois] en ai été rendu bien fier...

Avec Joomla! vous disposez d'un site en ligne et pouvez le triturer tout à loisir. Modification d'articles, ajout de modules forts utiles [forums, newsletters, upload de documents, vente en ligne, gestion de projets, statistiques, photothèques, communauté d'utilisateurs...], il peut tout et fait tout...

A condition bien sûr de passer un temps considérable en paramétrages divers, d'essuyer sueurs froides et poussées d'adrénaline, pour adapter cette merveille aux désirs alambiqués de clients inconscients [d'autant plus que la diva à son petit caractère - comme on dit dans les pubs pour chat- et que la souplesse n'est pas son fort...].

Mais quand on aime on ne compte pas !...

>> http://www.joomla.fr
>> http://www.joomla.com

dimanche 2 décembre 2007

L'Amérique et ses mythes

Des allers-retours, une oscillation de pendule, un effet de marées.

Un rythme lent et profond, régulier, efficace.


Une relation toute faite de langueur, d'attente de se voir et de s'étreindre enfin, d'embrassades fugaces dans des espaces temps soudain accélérés.

Depuis ma petite enfance, le mythe persistant d'une Amérique heureuse. Pas très réelle, un peu lointaine sous l'effet de la distance. Une Amérique sautillante et travailleuse. Des tableaux de Norman Rockwell, des voitures pas possibles, des paysages 16/9e des films de Wim Wenders, des couleurs primaires et chaudes, des bleus, des rouges, des jaunes...

Des stéréotypes qui me faisaient rêver : des blocs de maisons toutes en briques rouille et en néons scintillants, des paquets emballés dans du papier brun, un dans chaque bras, qu'on tient bien serrés contre soi, des robes à pois voletant de mouvements amples sous l'ondulation du vent, des foulards et des lunettes de soleil extra larges.
Une Amérique urbaine nocturne, colorée par les phares de voitures, pareils à de grands serpents rouges s'étirant sans fin dans la chaleur de la nuit. Une Amérique rurale, de grandes maisons ossature bois, vaporeuses sous la chaleur du soleil.

Je faisais mon délice à rêvasser des heures durant à une vie d'hôtels miteux, de cafés brûlants et essorés servis encore et encore par des demoiselles pimpantes et cintrées dans des costumes d'un autre temps, de roads-movies sans fins...

Une litanie renouvelée sans cesse ! Des envois réguliers de cadeaux entre les deux rives de l'Atlantique : des calendriers de Garry Larson et des bouquins d'archi, des magazines du Tour de France et de recettes de grands-mères... Des cadeaux qui me semblaient alors tout droit venus de la planète Mars.

Une Amérique vécue aussi, de rencontres et de parlottes au longs cours ! Un rêve touché du bout des doigts ; au bras de beautés pas farouches - dans des décapotables dévalant les échangeurs autoroutiers, écoutant la radio crachouiller Loosing my religion de REM - en voyage expéditionnaire dans un Greyhound gaulé comme une navette spatiale métallisée et scintillante lancée comme une balle entre New Orleans et Los Angeles, dans le sud poussiéreux du Texas et de l'Arizona.

Et curieusement une odeur qui m'est restée, dégoûtante, enivrante, et à nulle autre pareille, celle de la pluie sur le bitume chaud, dans l'air du soir après une journée de torpeur.


Un va et vient renforcé par toute une flopée de héros de films, de bd et de bouquins ! Tous ayant quitté l'Europe natale pour tenter leur chance derrière la ligne d'horizon. Troquant la grisaille pour une vie de découvertes et d'aventures. Les personnages de Cosey, de Steinbeck, de Sinclair Lewis, de Bukowski sont tous les fils d'un oncle infernal, précurseur et pionnier d'un monde vierge à explorer.

Les années ont passé et insensiblement la fascination me rattrape. Fidèle à la folie qui me hante et m'a gagné depuis longtemps déjà, je décidai de passer de l'autre côté du miroir. J'ai choisi comme terrain d'atterrissage de ma planète d'adoption une Amérique inconnue de moi encore, mais cent fois fantasmée et caressée en rêves : un Québec canadien palpitant de vie, de chair et de sang.

Destin depuis longtemps tracé déjà ou fuite en avant en coup de folie particulièrement réussi ? L'avenir le dira... Toujours est-il que le prochain Oncle d'Amérique, c'est moi !

mardi 20 novembre 2007

Expo photo : Martine Barrat et Larry Clark

Deux belles expositions à la Maison européenne de la photo.


Martine Barrat "Harlem in My Heart".

Pas de photos stéréotypées et attendues [violence, gangs, haine, quartiers délabrés, drogue au coin des rues], mais des portraits, souvent riants, et un jeu superbe avec la lumière, jouant sur les contrastes.

La pauvreté, elle, est diffuse - [dans les arrières plans, les intérieurs un peu miteux, les portes brinquebalantes, les vêtements d'un autre âge ou, en négatif, les plus belles robes sorties pour la photo]- mais jamais au premier plan. De belles photos sensibles et distanciées.

Au final ça infuse et on s'imprègne tranquillement de ce qui fait le quotidien de ce secteur de New-York.

Il n'y a pas de photo volée, au contraire, elles sont posées et acceptées. Les images sont chaleureuses.
On mesure la prouesse de Martine Barrat de se faire accepter et de tisser des liens d'amitié avec tout ce petit monde.



Larry Clark "Tulsa, 1963 - 1971"

C'est la face cachée de l'Amérique.


La vie dans un bled paumé au fin fond de l'Oklahoma [bon, contre toute attente, Tulsa est une grande ville moderne de 400 000 habitants]. Une jeunesse à la dérive. Un quotidien d'ennui et de drogue.

Des photos à contre courant, dans la forme [style reportage, caméra sur l'épaule, au plus près de l'action] et sur le fond [on est bien loin de la gentille Amérique wasp et conquérante de Kennedy].

Les photos ont été prises dans les années 60, mais sont encore étonnamment modernes...

Et la volonté, toujours affichée par Larry Clark, de démontrer qu'il est possible de tracer son propre chemin.



En bonus, au dernier étage, une petite histoire de l'art vue par le prisme des Livres de nu ! C'est toute notre société qui s'en trouve dévoilée...


Le site de la Maison européenne de la photo : http://www.mep-fr.org
Crédits photos : Martine Barrat et Larry Clark

jeudi 15 novembre 2007

Les trois caps

Non content de traverser l'atlantique à toute vitesse (tout est relatif mes enfants, le comité de courses m'a déjà arrêté deux fois sans motivation crédible, je me plaindrai !), voilà que je me lance vaillamment dans un tour du monde aventureux et épique ! A moi enfin les rêveries de couché de soleil, le passage des trois caps et les surfs endiablés des mers du sud...

Les sains d'esprit peuvent suivent l'épreuve sur barcelonaworldrace.com, les schizophrène peuvent encore s'inscrire sur www.liveskipper.com, et tout le monde de se retrouver fatigués et heureux à Barcelone dans quelques mois pour faire la fête...

Mon bateau s'appelle Moby-Dick, celui de ma fidèle acolyte, Fend la Bise.

Amis d'écume je vous souhaite bon vent !

mardi 6 novembre 2007

Les papillons

Les papillons. Tranquillement jazzy ; parfait pour voir s'écouler en rêvassant cette journée qui s'étire en longueur...

lundi 5 novembre 2007

La saveur amère de l'écume sur nos lèvres

Il est des équipées déraisonnables ; des décisions prises sur le fil qui engagent une vie entière sans espoir de retour. Tout jouer sur un coup de poker, montée d'adrénaline... Sortir de l'ornière, vivre sa vie, réaliser ses rêves et entrer dans une zone sensible délicieusement dangereuse, pour se sentir vivant enfin et citoyen du monde....


Ceci dit, rassurez-vous : d'aventure dans ce post, il n'en est pas question !

Grâce aux charmes d'Internet, si vous n'avez pas de première vie vous pouvez vous en inventer une deuxième [forcément meilleures, hein, chérie !...] et, bref, entrer dans l'univers déroutant des univers parallèles.


Fana de voile mais croulant sous le travail et ayant les réflexes usés d'un panda neurasthénique, je décidai néanmoins de traverser l'atlantique à bord d'une machine au comportement forcément improbable. Par quelle prodige ?! Facile ! Car la technique est là, servile, guidant d'une main habile les schizophrènes aimant à repousser les limites de l'impossible : http://regate-virtuelle.france3.fr


Vous me retrouverez sous le doux nom de Moby-Dick, cinglant plein sud vers les eaux poissonneuses du Golf de Gascogne, une drisse dans une main, une fine légère dans l'autre, me tirant la bourre avec mon double d'écume : Fend la bise !

Encore un verre de Sherry, Darling ?

mercredi 31 octobre 2007

lundi 29 octobre 2007

L'allemand, une langue pas si étrangère

Contre vents et marées j'entretiens depuis toujours avec l'Allemagne une histoire d'amour passionnée.


Son esthétique déjà. Solide et complexe, toute en constructions géométriques, faite de lignes de fuites, de plans et d'arrières plans.

Ses peintres merveilleux. Schiele surtout qui m'accompagne partout comme un ami fidèle, Gerstl à l'autoportrait riant depuis longtemps punaisé au-dessus de ma porte, les portraits de Böckl et ses aquarelles sensuelles et fragiles, aériennes touches de couleur aux équilibres parfaits.
Une partie de moi, en double fantôme, erre encore prisonnier dans les rues de Vienne entre Belvédère et Palais de la sécession.


Ses habitants surtout.

Plus adolescent, pas adulte encore, je me rendai à Francfort chez une amie de mon père pour y apprendre les subtilités du délié de la langue germanique. J'y déambulai tout le jour impressionné par le caractère systolique des autochtones, me gavant de bretzel et de bières amères dans des winstubs enfumés. Le soir venu je recréais dans ma chambre les esthétiques alambiquées de l'expressionnisme allemand avec la complicité riante de mon hôtesse. Elle, une coupe à la Louise Brooks et le regard en amande dans des poses improbables, moi, impressionné, imaginant sa peau diaphane au grain blanc velouté frissonnant sans défense sous mes caresses hâtives.


Cet amour depuis ne s'est jamais démenti ; les embuches ont pourtant été nombreuses.

Ma prof d'allemand, sous les traits d'un messager autoritaire, visage poupon encadré de lunettes fortes, était chargée par un esprit supérieur de tester ma foi naissante.

Elle usait et abusait comme sujets de leçons des thèmes les plus sinistres et les plus improbables.

Nous pensions à chaque séance avoir épuisé ses projets morbides mais, chaque semaine avec une régularité déroutante, elle alimentait sa petite boutique des horreurs de nouvelles abominations.

En vrac : faire de l'autostop à Tchernobyl, le cancer, le nazisme, la pauvreté, le suicide, la prostitution, les enfants battus, et j'en passe… Délice suprême quand elle mêlait les genres...


Nombreuses furent les victimes collatérales. Les amis épuisés qui dans un râle demandaient grâce. Les filles prises de délire, tremblotantes devant la face émaciée d'un orphelin éthiopien victime de guerre tribale, muettes, les larmes aux yeux, n'en pouvant plus. Des rangs, toujours plus clairsemés, s'enfuyant sans espoir de retour sous le regard amusé de notre bourreau.

Pour ma part je me mis en résistance et décidai de n'en apprendre rien. Entièrement tourné vers mon art [et subjugué par les formes plantureuses de cette matrone implacable], je restai insensible à son message. Au terme de ma scolarité, c'est vierge de toute corruption que j'échappai à mon sort ; nul en allemand mais sauf de tout parjure.



J'avais depuis longtemps oublié cette histoire quand un détail a troublé ma quiétude. Spectateur assidu des salles UGC je notai que le Label des spectateurs n'était depuis quelques temps qu'une suite sans fin de situations sans espoir. Un défilé de miséreux, de tétraplégiques, de paralysés sans espoir de rémission, d'orphelins abandonnés et livrés aux quatre vents, de belles anorexiques poussées au suicide, de rescapés en sursis, de catastrophes sans lendemain…

Refusant d'y voir une coïncidence, j'échafaudai les hypothèses les plus audacieuses et fis des jours durant des recherches fiévreuses. La vérité enfin se livra à moi dans toute sa simplicité : lassée d'effrayer des élèves sans défense [et ayant somme toute failli à sa mission] la prof d'allemand de mon enfance au rire innocent s'était attaquée à une tout autre challenge.

A chaque projection, je me fige et étouffe un petit rire crispé et l'imagine trônant sans rivale, maitresse ès programmation parmi un staff terrorisé, rayonnante, sure d'elle et de son art, au faîte de son génie pour notre plus grand malheur !

dimanche 21 octobre 2007

Giacometti à Beaubourg


Expo Alberto Giacometti à Beaubourg. Assez loin des idées stéréotypées que l'on se fait sur ce grand sculpteur.

Beaucoup de travaux préparatoires ; des plâtres, des esquisses, des carnets de croquis.

Des dessins sur les murs de son atelier qui font des arrières plans superbes, rouges et ocres, où le regard se perd.

Des photos.

De grands bronzes superbes qui, même tout petits, paraissent immenses.

De nombreuses toiles également, de Annette et de Caroline, parce que Giacometti était aussi un grand peintre.

Un souci de cadrage. De retrancher pour n'en garder que l'essentiel.

Un beau lieu d'exposition sur les toits suspendus de Paris [ouvert sur un horizon de reflets scintillants, prolongeant le regard, recréant une atmosphère un peu onirique] convenant superbement à cette oeuvre élancée et aérienne.

mardi 16 octobre 2007

Ma vie en un raccourci

En ce temps là, j'étais jeune encore. Je faisais des visites régulières à une brune pas farouche qui avait posé les bagages de sa vie aventureuse Rue du théâtre, à Paris, à deux pas de la Tour Eiffel.

Un bel appartement, 3 pièces tout confort. Je n'en ai pas vu de si beaux depuis. Un luxe de sur mesure, de tissus riches et de drapés soyeux. Je profitais de ce luxe éphémère, devinant ma chute prochaine, m'enivrant de couleurs, de caresses et d'odeurs.

J'étais fébrile alors. Je fumais beaucoup et mangeais peu. Brûlant de mille feux pour ma belle ténébreuse, je grillais de l'essence dans des allés/retours Province/Paris sans fin (le trou de la couche d'ozone, c'est moi !) et promenais ma carcasse de grand échalas dans la brume au soir tombé, ruminant de sombres pensées, contemplant ma perte et m'y précipitant néanmoins avec délices.

Mon destin d'alors avait cela de pratique : il était prévisible. D'un grand éclat de rire ma belle prit son envol, me laissant seul sous un ciel lourd de nuages.


Les années ont passé.

Assoiffé de couleurs, je troquai les cheveux aux profonds noirs de jais pour un rouge exubérant. Amoureux de la vie, je quittai ma province et les avenues de papier glacé pour un appartement sur le Canal Saint-Martin. J'y mène une vie mouvementée dans un monde en raccourci, rythmée par les crises d'angoisses de locataires pris de démence. [L'immeuble lui-même semble agité de vie. Pas un calme apaisé, non, mais une violence brutale. Une respiration sifflante de tuberculeux. De longues plages de rémission, comme pour rassembler ses forces, avant déchaîner les rounds de furie destructrice. Une vie de respirations crachouillantes, de spasmes et d'humeurs. De folies incontrôlées, de vents de paniques plus vraiment maîtrisés, de soubresauts agités et nerveux. A chaque étage sa psychose, son fou et sa lubie.]


Cette existence tempétueuse dans une cage à lapin, les enchaînements de nuits blanches et de jours noirs, commençaient à sérieusement me lasser, et soucieux d'accomplir le rêve d'une vie -[en somme de lier l'utile à l'agréable]- je décidai de m'expatrier sous d'autres cieux plus cléments. Pour des raisons très irrationnelles, mon dévolu s'est arrêté sur la belle province du Québec, objet dans un coin de mon esprit des fantasmes les plus fous.



Depuis longtemps je ne pensais plus à mon adolescence, quand un hasard rigolard me fixa rendez-vous.


Suspendu dans les airs entre deux mondes, à cheval entre Dupleix et Bir-Hakeim, sur un fil invisible je vis défiler ma vie en un raccourci attendrissant. J'assistai en spectateur amusé à ma résurrection. Une petite mort sans douleur, un endormissement, une vie passée que je garde bien au chaud à l'intérieur de moi. Pour l'oublier pourtant. Et, dans un grondement de rouages : une naissance, une vie nouvelle loin des efforts vains ; des promesses de voyages, un horizon de glace, de l'air gavé d'oxygène à nous en étourdir et ce sang visqueux coulant avide et chaud dans nos veines.

Sur le quai j'aperçus une âme follette souriante, à la chevelure d'un rouge farfelu. Un phare indispensable aux aventuriers de l'improbable. Une fée sautillante et joyeuse prête à toutes les aventures. La face lumineuse de mon âme damnée. L'ange gardien de ma nouvelle vie.

Je descendis du métro en homme neuf. A mi-chemin entre la Tour Eiffel et la Statue de la liberté. Et me lovai dans les bras alanguis de ma maîtresse...

jeudi 11 octobre 2007

Charrette

Voila une semaine que je suis ligoté à une chaise, vissé à une table, le yeux plongés dans l'écran vitreux qui me fait face [comme les jeux que nous faisions lorsque nous étions enfants, sauf qu'ici personne n'a envie de rigoler...], effet hypnotique, je lutte pour ne pas me faire engloutir et passer de l'autre coté du miroir... [Ce face à face sanglant me fait souvent penser aux baisers tragiques des amants, chacun essayant de manger l'autre. Des grands peintres s'y sont essayé - Lydie Arickx, Roger Decaux ou Paul Rebeyrolle- il se dégage de leurs oeuvres une tension qui donne le vertige. Au cinéma, dans un autre style, on voit ça très bien dans le Baiser de la femme araignée...]

A la manière d'une dactylo habile, je tape des lignes de code à la volée. Mon univers se rétrécit, ma vision se brouille, quand je ferme les yeux les murs semblent suinter d'idéogrammes sans fin, je comprends alors la douleur des insectes et des robots...

Heureusement (car il y a un heureusement), un cordon ombilical me relie au monde et alimente ma solitude de musique de charrette.

En vrac, Tom Waits, Buck 65 [surtout l'album Square, sorte de fresque de l'impossible, très travaillé], Antony and the Johnson, Sade [pour l'irremplaçable Jezabel], Dylan [when the deal goes down, ce clip que j'aime tant et sur lequel je vais jeter un coup d'oeil de temps en temps], et en ce moment un groupe français découvert récemment, Les Blaireaux [en concert à Paris le 18 octobre, qu'on se le dise].

Vivement la mise en ligne !

vendredi 5 octobre 2007

A écouter en boucle

Deux groupes qui donnent le vertige, à écouter en boucle (je que je fais à longueur de journée, le casque sur les oreilles...) !

Thedo, un groupe Finlandais, bientôt en concert à Paris, le 4 décembre, vivement !
Sur Myspace...















Little Annie et sa chanson enivrante Strange Love, à écouter en boucle ...
Sur Myspace aussi...

De quoi bien attaquer le week-end qui se profile à l'horizon !

mercredi 3 octobre 2007

Olé !

AR rapide Paris Valence, je pensais avoir du temps pour visiter la ville et marner rêveur devant les oiseaux rares de la récente coupe de l'América ... Nada !

Deux jours passés dans les transports [RER glauque des petits matins parisiens ; pressurisé comme une tortilla espagnole dans mon siège Vueling ; bringuebalé à fond la caisse dans des taxis fous furieux zigzaguant entre les piétons, évitant les accidents au risque d'en créer d'autres, mais se faisant un point d'honneur à ne pas me faire perdre trop de temps, ce que je saluais à grands coups de gracias crispés].

Deux jours de réunions ou l'important n'est pas le contenu finalement [Internet & Co], mais l'amitié entre les peuples [n'oublions pas que cette petite sauterie décontractée était organisée par l'Europe] !

Deux jours de décalages horaires, de nuits dézinguées, de sommeil écourté, de tapas, de canapés virevoltants et de grands verres de vin rouge !

Deux jours à être perdu dans un autre espace temps, à me tromper d'hôtel [en sortant hagard du taxi fumant je rentre dans le premier hôtel se présentant à moi, tout en moquette, miroirs et luxe feutré, créatures alanguies et hautaines laissant glisser sur moi un regard mouillé de bovin, et moi désolé, battant en retraite, saisissant mon sac, saisissant ma réservation inutile, ne regardant plus l'accueil, ne regardant plus les filles, sortant dans un fracas de portes battantes pour rejoindre l'hôtel là bas, le mien, au bout de la rue... ], à me tromper de toilettes [caballero hombre , pas señorita... ah !?], à me tromper de timing [un petit coin à moi sur une place de la vieille ville dans l'air chaud encore des fins de soirée, une cigarette, une bière et un groupe de musique tziganes, violon et contrebasse - à peine avais-je allumé ma cigarette que le mirage s'évanouissait me laissant en plan avec une clope trop forte, sans musique et sans femme ! ], à me tromper d'interlocuteur [comment ça vous n'êtes pas Andréaa ?! Quelle étrangeté ! Vous l'embrasserez pour moi ! Vous n'oublierez pas n'est-ce pas ? Encore un verre de vin ?]...

Un peu enivré des vapeurs locales je rentrai à Paris aussi vite que j'étais venu et tombai nez à nez avec une pluie glaciale ! Alors que je me frayais un chemin parmi les poussettes et les voyageurs hagards, cherchant mon chemin dans le labyrinthe crasse du Terminal 2, une main amie se glisse sous ma chemise et un souffle chaud sur mon cou... Guidé par cette apparition, vivant parmi les morts, je m'enfonçai dans la nuit...

mardi 25 septembre 2007

Voyage d'affaires

Demain, finie la grisaille parisienne, je file en Espagne pour un voyage d'affaires express ! Voyage d'affaires, j'adore ces mots !... Tous frais payés aux frais de la Déesse Europe -[pas trop cher je vous rassure et ma présence est indispensable, que feraient-ils sans moi, petites âmes perdues, sautillantes sur leurs sièges dans l'immensité d'un Palais des congrès à moitié vide ! ]...

Mon amour, enlaçons-nous enfin !

jeudi 20 septembre 2007

Colloque et Cie

A peine remis des mes aventures suédoises, ma carcasse glissée dans une rame de métro bien tassée, je fonce pleine balle vers l'Ouest parisien. Là m'attend une journée de colloques - conférences pleine de promesses : La 4eme Convention E-Commerce Paris 2007 : Préinscription gratuite, n'attendez pas !


L'entrée dans le Palais des congrès tient du parcours initiatique : souterrain visqueux et murs transpirant de crasse ; sorte de cordon ombilical entre deux mondes - celui des humains et le fabuleux monde virtuel du commerce en ligne.

Une zone de transition - un hall en réfection - échafaudages et structures métalliques emboitées, passerelles et pontons suspendus. Des ouvriers et des peintres se balancent dans le vide, passant d'une plate-forme à une autre comme des singes acrobates, et donnent à cette journée une inflexion tranquillement surréaliste...

En haut des escaliers ; le monde parallèle du markéting.
C'est une nuée de clones dont on ne sait pas s'ils existent en vrai, en dehors des heures de travail ; si à la fin de la journée il errent dans des lieux inconnus de nous ou sont rangés dans des placards secrets attendant qu'une main invisible leur prête vie chaque matin. C'est une multitude de vestes rayées, de chemises violettes satinées, de boutons de manchette nacrés, de cheveux effets-mouillés et savamment ondulés.

Les conversations roulent comme des petites billes sur une moquette épaisse. Tout semble anodin dans ce monde aseptisé, mais les rituels suivent en réalité un code savamment codifié.

Un mélange de psychologie de bazar et d'études comportementales, des phrases types, un mot sur deux en anglais, phrases d'accroche tout droit sorties des manuels d'école et débitées à la coupe, comme les longues complaintes sans âme des sdf dans le métro.

Entre les pauvres dans l'errance et les cadres gominés, de l'extérieur il y a un monde. Mais à l'intérieur, la même misère; une spontanéité feinte de bateleurs en tournée, pas une phrase qui ne soit apprise par coeur, malaxées cent fois et récitée d'une triste voix de métronome. Des phrases formatées, sans sens ni but, parcheminées d'anglicismes qui ne veulent rien dire. La langue des pantins et des analphabètes.

Des accroches toutes prêtes, des césures ciselées aux petits oignons, des petites astuces minutées, glissées avec un regard complice, pour détendre l'atmosphère, de l'assurance en boite certifiée inusable et garantie cent ans.

Identique cette tristesse aussi. Les petits stands déserts, les costumes et les tailleurs raides et inutiles, dépliés sur des estrades trop grandes pour eux, moqués par leurs confrères, se balançant d'avant en arrière dans une transe hypnotique, comme les joueurs en pause des jeux vidéo. N'attendant qu'un appel pour s'animer enfin et sortir de leur torpeur comme un diable à ressort de sa boite.


Dans cette procession de robots de carnaval, quelques spectateurs hagards, facilement identifiables. Engloutissant stoïques, pour tenir le choc, des sandwichs mietteux et de grands gobelets de café acre. Faisant des sauts de puce de stand en stand, jonglant avec les concepts, tentant des synthèses improbables, et glissant - malgré des efforts vains - sur la surface polie des papiers glacés des brochures vers un abîme sans fond.

La journée se prolonge dans un délire de fièvre. Alors que j'errais dans les allées labyrinthiques, j'aperçus deux anges siamois, émissaires virginaux d'un bras vengeur. Deux nymphes éberluées, aux ailes de riches plumes soyeuses d'un blanc immaculé, majestueuses et dignes, diaphanes, légères d'une grâce absente. Deux espionnes glissant parmi nous avec l'assurance tranquille des saints.

Pris de peur je décidai de m'enfuir...


mercredi 12 septembre 2007

Allez y doucement cette fois

La pub nous en promettait des merveilles ; une vie de rêves éveillés, de crocodiles apprivoisés se faufilant à nos pieds , extatiques, comme sur le point de ronronner, des filles pour le commun des mortels hautaines et dédaigneuses, mais à moi offertes, lovées autour de mon cou, cajolantes même, faisant jouer leurs doigts agiles sur le bord de ma chemise négligemment ouverte !

Et moi transformé, non plus une paillette lumineuse ballottée dans un tunnel de doute, mais un fier guerrier des temps modernes, quoique sensible pourtant, le corps bardé de muscles saillants, mais dynamique encore, profilé, comme étudié en soufflerie. Bref, un beau brun ténébreux libre d'une vie de plaisirs !

Vous l'avez compris, j'allais être, mais pour quatre jours seulement, le propriétaire d'une Toyota Aygo, rouge, scintillante, frémissante dans l'attente du départ.

Et là devant nos yeux ébahis, le miracle se produit et nous devenons les spectateurs de nos propres vies, un univers des possibles toujours ouvert s'ouvrant à nous, se déroulant comme un long ruban sans fin.

Nous nous sentons d'emblée appartenir à la caste des hommes libres ; notre vie défilant à nos côtés à des vitesses improbables, et nous bien calés, flottant de bonheur dans ce monde de manga, envoyant des regards complices au bikers alentours !

Les kilomètres défilent, et nous revient sans cesse cette petite musique, comme une litanie, qui remonte de l'asphalte : Allez y doucement cette fois...

vendredi 7 septembre 2007

Sauts de puce

Sauts de puce d'îles en îles, notamment Utö et Fjarland.

Etablissons notre camp de base dans les campings déserts [les derniers touristes se sont fait suçoter la moelle et les os par des moustiques voraces] et passons nos journées à nous perdre sur des sentiers de pierre et de bruyère.

Nous laissons bercer par la somnolence tranquille des îles en fin de saison et par l'activité placide des petits ports. Villages et fermes essaimés d'une grappe de bâtiments d'un beau rouge/rouille.

Un temps figé semblable à nos souvenirs d'enfance semble ressuscité, jusque dans ses couleurs jaunes orangées des fins d'après midi. Un temps de jeu et d'insouciance où rien n'avait d'importance que de dormir dans des cabanes, de courir éperdus sur des pontons de bois et de sauter dans l'eau, encore et encore, ne se séchant jamais, de l'eau plein les yeux et les cheveux plaqués, laissant le soleil nous griller la peau.

Un temps à régner sur un monde de forêts multicolores et lumineuses à décider en maître du destin d'une armée de petites bêtes et à tracer pour elles une vie de gloire et d'aventures sur des chemins nouveaux.

Mais l'enfance en allée trouve ses compensations.
Les criques perdues recèlent de plaisirs nouveaux, et je me voyais mal, il y a longtemps déjà, imaginer dans les paysages et les plis de matière des mondes en miniature.

Recherchant des équilibres entre les lignes de fractures, des tableaux abstraits dans les fragments de matière, des notes de musiques dans les arrangements de petites mousses phosphorescentes tachetant la surface grise des roches.

Comparant la peau grêlée des pierres à des paysages vus d'avion, la moindre crevasse semblable à un cours d'eau reptilien, ou rêvassant des heures, m'imaginant, en macro, lilliputien dans un monde géant de mousses et de lichen.

Quittons Fjarland le lendemain d'une nuit d'automne, notre petite tente bien isolée au milieu d'une grande clairière bordée d'une forêt agitée de soubresauts. Comme rendue vivante sous les coups du vent.

Nous prélevons quelques branches de bois mort sans s'aventurer trop pour ne pas réveiller quelques vieux maléfices vikings [bien gardés cependant par les épeires dodues traquant les moustiques et les français bien nourris dans l'arrangement savant de leurs toiles géantes]. Alors que le soir tombe, la fumée de notre feu se confond avec un brouillard chargé de pluie.

Le vent fait frissonner la cime des arbres. Bien agrippés à nos marshmallows grésillants on se dit que l'hiver ici ne doit pas être tendre pour les âmes en délicatesse. Une nuit d'encre d'un noir épais mâtiné de bleu sombre nous avait depuis longtemps enveloppés qu'un grand suédois surréaliste sort à poil de son sauna et s'ébroue au loin dans un bac d'eau glacée.

Portées par le vent, nos pensées et les braises incandescentes s'envolent et se perdent…

vendredi 31 août 2007

Archipel de Stockholm

Départ matinal aux lumières glauques des heures indues. Chaleur humide, sommes un peu poisseux...

Sanglés dans nos sacs à dos comme des saucissons (pas trop secs), on se cale bien au chaud et on regarde défiler les miles.

Baie de Stockholm sous un cil gris de flotte. La pluie fait des petites bulles à la surface de l'eau. On à l'impression qu'elle vient à l'envers et que dans un retournement de perspective on navigue sous la surface des eaux...

Nombreux chantiers navals un peu délabrés, vieilles coques de bateaux dézingués, alignement de tourelles et de grues comme de grands échassiers étirant leur carcasse squelettique vers le ciel. Quelques-unes peinturlurées en girafe.

Rêve d'avoir un bon bourrin et de passer mes journées à sillonner la baie à rêvasser et à prendre des photos.

Petites éclaircies. De longs filaments vaporeux gris et bleus s'étirent de la terre et des maisons comme leur ombre évaporée. Leur reflet brouillé ondule dans notre sillage, l'écume bouillonnant faisant une raie bien symétrique à ce monde entre deux rives.

La baie s'ouvre insensiblement sur le large. Le slalom serré des premières heures dans un paysage de Caroline du Nord (maisons en bois et terrasses protégées) est remplacé par un ondulement tranquille.

On aperçoit déjà notre première halte : ce sera Utö.

vendredi 3 août 2007

Départ en vacances

Saturation de vie parisienne, de voisins fous furieux

[- Mais tu vas te casser salope, dégage DEGAGE !!
Là les flics montent d'un pas fatigué, éreintés déjà de situations sans sens ni but…

Silence radio un moment, et ça redouble, musique à fond, bouteilles cassées et meubles qu'on déplace. Je monte, hagard mais poli, plein de déférence pour les situations surréalistes, mêmes pénibles.

- C'est quoi ce souk ?!
- J'ai appelé la police, car voyez vous je pensais que mon conjoint était mort…]

Routine asphyxiante, petites nuits dans les chaleurs glauques de sommeil éthéré, les murs jaunes et crasses qui se gondolent, les fissures qui se crevassent chaque jour un peu plus et s'ouvrent sur un cœur béant, les carrelages scotchés recouvrant les murs, pendouillant lamentables... Un appartement se transformant chaque jour un peu plus en un cauchemar fiévreux.

Boulot, mi speed, mi calme, moi me débattant dans cette mélasse glauque... Beaucoup de projets à rendre en septembre / octobre - mais vacances imposées...

Me colle dans un train, sas au dos, et traverse la France comme une balle, la gueule collée à la fenêtre pour me saouler de vitesse et me dessaler au vent... Mon voisin s'est endormi mine de rien sur ses sodokus, la graisse de son cou lui faisant une collerette salvatrice et rebondie amortissant les chocs du voyage. Une vampirette pas farouche me fait de l'oeil à travers les interstices des fauteuils sncf, faisant frisotter agréablement ma colonne vertébrale. Je revis…

Maison familiale, paumée dans la forêt, terrasse camps de base à l'horizontal de nos vies. Les projets sont bien alignés vibrants dans l'attente du départ ! Sans trop réfléchir nous mettons les voiles pour la Suède !

Hâte de retrouver les lumières délavées, la mer aux écailles de poisson scintillantes au soleil et les grands ciels saupoudrés de nuages, posés là comme des petits pains mous sur un plateau invisible...

jeudi 26 juillet 2007

Le blog est ouvert

L'opération a quelque chose de chirurgical : le Blog est ouvert !

Une longue phase de concentration, hypnotique, le corps animé d'un déséquilibre incertain, à l'image de ces sportifs de l'extrême se remémorant chaque geste à venir avant de s'élancer dans l'abîme.

Un coup de lame ; rapide et sûr. Unique trait sur un tableau noir...

Et s'ouvre le petit théâtre fébrile de mes jours :

Manue la Rouge, le regard tranchant comme un rasoir. La main sur le coeur. Experte en dédales shakespeariens et maîtresse du château d'Elsinor. N'a pas son pareil pour dégoter un rade pas farouche dans les arrières cours de l'Est parisien.

Mes amis, vus souvent autour d'un des mes petits verres de bistro ciselés. Du whisky, souvent, à la force câline des tourbes d'Ecosse. Des vins de Bordeaux chauds et fruités. Nos soirées à papoter comme des vieilles femmes. Nos retrouvailles et nos éparpillements. Et leurs ombres qui me prolongent et me suivent partout comme des doubles riants.

Tornado, un destrier hollandais. Traverse Paris comme une balle, se saoulant de vitesse et de vent. Les flancs recouverts de cette mousse blanchâtre qui colle à la peau. Répondant uniquement à la voix de son maître...

Une collection de voisins braillards, alcooliques, névrosés et psychopathes qui font que mes jours sont plus calmes que mes nuits...

Des plantes vertes et grasses se languissant à la fenêtres, étalant leurs formes généreuses, excitant les convoitises.

Des expos, petits coins de paradis. S'imprégner de chaque toile. Se perdre dans les fonds, gravir les aspérités, se vautrer dans les couleurs. Laisser aller sa main sur ces surfaces chaudes et rugueuses, vivantes, si semblables à la peau des femmes.

Et surtout des voyages. Des avions qui décollent, des trains fumants engrangeant les miles. Des sauts de puce ou des ballades au bout du monde, m'emportant moi, le sac rivé au dos, dans le vaste monde...